HISTOIRE DE MONTSALVY

Village de Haute-Auvergne

Les origines

Il est difficile de dater avec précision l’origine du village de Montsalvy. Ce qui est certain c’est que les premiers édifices : le « moutier » (monastère), l’église et une maison faisant office d’hospice, ont été érigés sur des terrains donnés par Béranger Vicomte de Carlat et fils de Richard II à Gausbert, qui souhaitait développer à cet endroit l’esprit civilisateur du christianisme. L’acte de donation a été daté de 1030. Il s’agit sans aucun doute d’une erreur de copiste car la donation a été consentie sous le règne de Philippe 1er qui n’est monté sur le trône qu’en 1060. La donation est donc postérieure à cette date, ce qui est corroboré par l’arrivée présumée de Gausbert à Montsalvy vers 1060.

Gausbert serait né vers l’an 1 000. Il aurait exercé son ministère près de la ville de Thiers, avant de devenir ermite au Puy en Velay, puis au monastère de SaintAmans de Rodez où sa vocation s’épanouit dans la règle de Saint Augustin. C’est là qu’il remarque un jeune religieux du nom de Bernard qu’il va convaincre de l’accompagner. Gausbert se serait ensuite rendu à Montsalvy vers 1060, décidant de s’y installer.

Idée curieuse que celle-ci  ! Le lieu, une terre en friche, est occupé par des brigands. Il est triste, battu des vents qui descendent sans concession depuis les monts du Cantal, balayant le plateau avec rigueur.

De plus, à la fin du Xème siècle, à l’approche du XIème et de la rumeur d’une prochaine fin du monde, on ne bâtissait plus ! Mais Gausbert ne cède pas à la panique. Il croit au contraire en l’avenir de son projet. Les premières constructions semblent débuter au milieu du XIème siècle.

Montsalvy est né !

Sa population est d’environ 25 habitants.

L’église

Les parties les plus anciennes datent donc du XIème siècle(abside chœur et transepts ainsi que le commencement de la nef et un petit clocher). Construit en granite et en schiste, l’édifice semble avoir été achevé au XVème siècle. La toiture est en lauze.

Le monastère

Il fut fondé vers 1050. Des donations furent faites au monastère. Un grand nombre de bénéfices retranchés des évêchés de Clermont, Rodez et Cahors lui furent attribués.

Composé d’une salle capitulaire, de dépendances et d’un réfectoire, il s’est érigé autour d’un puits et sans doute d’un jardin de plantes médicinales.

La maison hospice

Construite à côté du monastère, c’était l’un des premiers hospices connu en Haute Auvergne. Refuge salutaire pour les pauvres ou les voyageurs, elle eut son utilité mais ne devint jamais établissement de soins.

Etymologie du nom : Montsalvy

Trois versions s’opposent :

1°) Mont de salvius: Salvius était un saint très renommé chez les francs.

2°) Mon salvi : Mont du sauvé. Cette hypothèse ferait allusion aux secours prodigués aux pauvres et aux voyageurs dans l’hospice de Montsalvy crée en même temps que le monastère et qu’on nommait «  sauveté ».

3°) Mon salutis : Bâtie sur une friche abandonnée aux larrons et aux brigands, Montsalvy serait devenu le Mons salutis, le mont du salut. C’est cette dernière hypothèse qui plait le plus à nos contemporains.

Pourtant d’après l’ouvrage de l’abbé Muratet paru en 1843 : « notice historique sur Montsalvy, sur son église et sur son ancien monastère » c’est la première hypothèse qui semble la plus probable.

Administration de Montsalvy sous Saint Gausbert

1°) Administration religieuse

Après la période du défrichement et de l’érection des bâtiments sous l’égide de saint Gausbert, puis Saint Bernard, on assiste à la création d’une paroisse à Montsalvy entre le XIIIème siècle et le XIVème. Jusqu’en 1317, celle-ci relève du diocèse de Clermont et ensuite de celui de Saint-Flour.

2°) Administration civile

Comme ailleurs à cette époque, elle est confiée à 2 consuls* nommés par le prévôt. Les quelques écrits qu’il a été possible de consulter en 1840 par l’abbé Muratet, mentionnent les noms de Lagarde, Astié, Goutal, Cassès, Guy, Puech, Montarnal…

La friche occupée autrefois par les brigands est devenue un lieu florissant aux foires renommées.

3°) Administration judiciaire

Un juge et un procureur fiscal sont nommés par l’abbé de Montsalvy. Pour certains délits, la justice de Montsalvy infligeait la peine du carcan : le condamné était attaché par un collier de fer, à un poteau dressé sur la place de Peyre, au centre du village. Un écriteau faisait connaître son nom, son domicile sa peine et sa condamnation.

* Les consuls étaient pour les province du midi, des officiers municipaux, comme l’étaient les échevins à Paris, Lyon et Marseille.

La fin du monastère

Deux lois de 1789 et 1790 suppriment le monastère.

Le 9 janvier 1794 sur la grande place, le maire fait lecture d’un discours très républicain. Quelques jours plus tard, l’assemblée du peuple décide à l’unanimité, le démolition du clocher de l’église abbatiale et confie la tâche à un charpentier local qui est en même temps, officier communal. Les confessionnaux dans l’église sont également détruits durant cette époque tourmentée.

Lors de la Terreur l’abbé Jean Pierre de Meallet de Fargues, qui était devenu abbé de Montsalvy par permutation avec l’abbé Gaston, ne renia pas sa croyance. Il resta fidèle aux principes de l’église catholique et fut regardé comme un prêtre non-assermenté. Il fut alors obligé de se réfugier en son château de Faulat, commune de Marcolès, pour ne pas être obligé de sortir de France. Mais il fut dénoncé, arrêté par des révolutionnaires et conduit à Figeac, puis à Cahors. Condamné à mort comme prêtre réfractaire, il sera exécuté revêtu de ses ornements sacerdotaux, le 24 septembre 1794.

Un seul prêtre, à Montsalvy, a prêté serment à la Constitution civile du clergé, plus tard il se rétracta.

Un autre simulera même la folie pour ne pas jurer.

Que deviennent les bâtiments à cette époque ?

Le réfectoire des moines est racheté par la commune en 1791. Il a alors servi de mairie et d’école.

Une tour adossée au réfectoire et qui abritait la prison fut achetée tour à tour par un particulier puis par la municipalité et elle fut finalement démolie en 1869 en raison de sa vétusté et des dangers qu’elle représentait.

Les châteaux de Montsalvy

1°) Le château de Mandulphe

Il était situé au nord, au lieu-dit : le Puy de l’Arbre, point culminant connu plus anciennement sous le nom de Puy Lac ou Montem altum. Le château a sans doute, été érigé sur un monticule artificiel, une motte castrale.

Lorsque Béranger donne à Gausbert les terrains pour construire le monastère, le château de Mandulphe est déjà en ruine. L’acte de donation fait état de « terrains situés dans les dépendances du château de Mandulphe. ( castellum Mandarulphum)

Ce château fort, appartenait à Béranger Vicomte de Carlat. Il lui fut enlevé et devint la propriété de la famille d’ Armagnac. Jacques d’Armagnac ayant conspiré contre Louis XI, fut condamné à mort et massacré en 1418. C’est ainsi que le château de Mandulphe fut détruit sur ordre de Louis XI. La destruction eut lieu vers 1477.

En 1834, une fontaine pavée a été retrouvée sur les lieux ainsi qu’une girouette, privilège seigneurial.

Enfin lors de la mesure de l’arc du méridien terrestre par Delambre et Méchain, au Puy de l’Arbre, les deux astronomes notèrent « des vestiges d’un ancien château fort environné de fossés et de retranchements. »

2°) Le château de Montsalvy

On ne connaît pas exactement l’origine du château de Montsalvy. Il aurait été construit sur l’emplacement des anciens remparts.

En 1787, il appartient à Antoine Delmas, notaire royal. En effet cette année-là celui-ci obtient l’autorisation de faire construire une salle au-dessus de la porte d’Entraygues, porte mitoyenne à sa propriété.

Une tour ronde est ajoutée au château au cours du même siècle.

Le fils d’Antoine Delmas, Joseph Noël sera le premier conseiller général du canton de Montsalvy.

Son petit-fils, Jean-Justin Delmas s’inscrit au barreau d’Aurillac après des études de droit et s’engage dans la carrière préfectorale.

Préfet de Mâcon en 1840, il abandonne ses fonctions humanitaires qui l’avaient conduit à créer une école agricole et de nombreuses fondations . Il devient alors préfet de la haute-Garonne. Puis il devient secrétaire général au Ministère de l’Intérieur et directeur du Mont de piété.

Le fils de Jean-Justin Delmas, Albert-Joseph , entre dans la diplomatie en 1851 au Brésil puis à Berne et à Turin. Préfet de l’Héraut puis du Puy-de-Dôme jusqu’en 1873. Il occupera de nombreuses fonctions (Conseil d’Etat et Cour des Comptes) avant de s’éteindre en son château de Montsalvy le 25 mai 1914.

Ses descendants ont cédé le château à la commune, à charge d’y créer une maison de retraite.

Montsalvy au XXIème siècle

L’histoire suit son cours. Montsalvy a été mis en valeur avec talent pour le plaisir de ses habitants et de tous ceux qui viennent le visiter.

Le cloître accueille chaque été des expositions dans le réfectoire des moines restauré avec compétence. La dernière exposition en 2011, est celle qui présenta les objets, livres, diplômes, médailles, photographies légués à la commune par les descendants de Marcelin BOULE. En effet le grand homme est né à Montsalvy en 1861. Professeur de paléonthologie, il fut le premier Directeur de l’Institut de paléonthologie humaine fondé en 1910 par le prince Albert 1er de Monaco.

Un « parcours du patrimoine » de Montsalvy est aussi possible grâce à une brochure mise à la disposition des visiteurs à l’Office du Tourisme. Ainsi vous pourrez découvrir le château, le monastère, l’église abbatiale avec son chevet roman, la rue des tisserands, les portes de la ville close.

Depuis quelques années la salle capitulaire, dans le cloître, est devenue la salle du Trésor d’Art Sacré du Pays de Montsalvy : un cadre somptueux pour accueillir et mettre en valeur, calices, ostensoirs, chasubles brodées confiés par les municipalités du canton.

Pour finir, voici un modeste conseil de l’auteur (non moins modeste) de cet article aux historiens de passage à Montsalvy :

Amis, attention !

Tous ceux qui viennent à Montsalvy pour découvrir son passé historique, risquent l’addiction…

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Sources de cet article :

  • Monographie des villes et villages de France : Histoire de Montsalvy par l’abbé Muratet réédition de l’ouvrage initial daté de 1840. Paris res universis Imprimerie P. Picut ISBN 978-2-87760-598-1
  • Montsalvy Une description, une histoire par Abel Beaufrère Imprimerie Gerbert Aurillac
  • Montsalvy : Une cité en châtaigneraie cantalienne P.F.Aleil-Montarnal et R.Gaston-Crantelle Imprimerie moderne Aurillac ISBN 978-2 -90126-472-6